La stratégie du grain de sable

Une expéri­ence de non-vio­lence en zone de guerre. Au cœur de la région d’Urbaba en Colom­bie, une terre fer­tile, riche en ressources naturelles est l’un des cen­tres névral­giques de la gueril­la. Une com­mu­nauté prise au piège. Sous les balles des para­mil­i­taires, de l’armée nationale et des FARC, des hommes et des femmes con­tin­u­ent de vivre. Ils se déclar­ent Com­mu­nauté de Paix le 23 mars 1997. Ces paysans déplacés par les con­flits refusent caté­gorique­ment de quit­ter une nou­velle fois leurs ter­res. Ils exi­gent le respect pour la vie, la dig­nité en tant qu’être humain. Cette expéri­ence col­lec­tive de non-vio­lence en zone de guerre a fait naître une édu­ca­tion alter­na­tive et des échanges économiques sol­idaires. Après 15 d’existence, plus de 170 morts pour une pop­u­la­tion de 1200 per­son­nes, la Com­mu­nauté de Paix con­tin­ue d’avancer dans ce proces­sus de résis­tance civile, paci­fique et politique.

La stratégie du grain de sable, édi­tions de l’Atinoir

La com­mande orig­inelle — une carte de local­i­sa­tion per­me­t­tant de situer la com­mu­nauté — a vite gag­né en com­plex­ité au vu des enjeux géopoli­tiques de la région. J’ai finale­ment pro­posé deux cartes com­plé­men­taires, à deux échelles différentes.

La panaméri­caine et la région de Darién

Con­sti­tuée de marais et de forêt, foy­er des peu­ples Emberás, Wounaans et Kunas, la région de Dar­ién (ou le « bou­chon de Dar­ién ») est générale­ment con­sid­érée comme le dernier obsta­cle à l’achève­ment de la route panaméri­caine, qui tra­verse l’Amérique de l’Alas­ka à la Patag­o­nie. Les enjeux envi­ron­nemen­taux (la région accueille deux parcs nationaux, un côté panaméen et un côté colom­bi­en), les dif­fi­cultés tech­niques et les dan­gers avérés (présence des para­mil­i­taires et de la guéril­la colom­bi­enne) ren­dent peu prob­a­ble l’achève­ment de la route, qui se ter­mine donc à Yav­iza (1700 hab.) au Pana­ma et reprend à Tur­bo en Colom­bie, à quelques kilo­mètres à peine de la Com­mu­nauté de Paix de San José de Apartadó.

Le développe­ment indus­triel et por­tu­aire, un cheval de Troie

Autour du pro­jet de con­struc­tion d’un nou­veau port dans le golfe d’Urabá, c’est tout un com­plexe indus­triel qui est sur le point de se dévelop­per dans la région. Cen­trale élec­trique, usine d’a­lu­mini­um, usine d’embouteillage et d’ex­por­ta­tion de l’eau douce, pro­duc­tion de bio­car­bu­rants, exploita­tion des ressources en pét­role et en char­bon, et en terme d’in­fra­struc­tures, creuse­ment d’un canal sec inte­rocéanique et d’un nou­veau tun­nel: autant d’élé­ments dis­tincts rat­tachés à la même stratégie glob­ale de développe­ment par l’in­dus­trie d’un ter­ri­toire enclavé et dif­fi­cile à contrôler.

Jérémy Garniaux
Jérémy Garniaux
Développeur SIG & doctorant en archéologie numérique